In Site/Imaginal Light est l’espace des pièces basées sur la possible
sculpture mnésique et le phénoménal inframince des lumières imaginales.
Je questionne le lien de l’homme à l’espace environnemental, naturel/artificiel/spirite.
De ce fait dépendent tous les principes de la construction identitaire, économique, politique, imaginaire, sensuelle.
Et de la re-présentation (images, littérature, philosophies, etc…) de cette relation, des connaissances et croyances qui en découlent.
Se dessinent alors des choix et des engagements, des attitudes et des formes.
Je travaille, au sens premier du terme, avec ces intellectualisations, ces représentations, ces matérialités, ces forces, ces projections.
Ces esprits et ces fantômes, forces matiéristes.
Et je propose de nouvelles réalités qui se jouent des apparitions et de disparitions : une écosophie engagée et poétique.
Ou plutôt, je révèle celles qui sont en présence et non considérées, dans et autour de nous.
Ma recherche plastique et théorique autour de la notion de Paysage m’a mené logiquement à la considération des matérialités.
Maintenant, ma recherche se déploie autour des matérialités inframinces.
Et c’est ici que se développe l’intérêt principal de mon travail.
Les pièces ne sont que des prétextes matériels visibles, sensuels.
Des supports, des tremplins. Pas des fins en soi. Juste des accès à autre chose.
De réels objets transitionnels (cf les recherches de Winnicott).
Quelles que soient les formes plastiquent que je propose, elles interrogent la notion de Lumière : celle que le soleil dégage, et qui révèle tout et sculpte, questionnement millénaire; mais aussi, et surtout la lumière que nous générons nous-même par les images mentales (rêves, idées, projections, délires, rencontres des autres mondes…) ou dégageons.
Là est mon travail.
Là est ma recherche.
Là est mon obsession.
Là est le nouveau monde, le nouveau paysage.
J’actualise le questionnement théorique et plastique des Site et Non Site engagé par Robert Smithson.
Et je propose la relation d’étude suivante
Site / Natural light
Non Site / Artificial light
In Site / Imaginal light
c’est à dire le mindscape , le paysage intérieur, sa physicalité, avec une existence entre deux états, matérielle, immatérielle, vibratoire.

Et je travaille son espace, sa temporalité, sa matérialité, ses ondes.
Pour cela je dégage un complexe Paysage / Mémoire
Mon point de départ fut de constater que mon espace mental est peuplé de matérialité différentes, mais que ce qui se déploie là est de l’ordre de la phénoménologie lumineuse et sonore.
Je vois des amas de lumière qui composent puis décomposent et recomposent. Je ressens ces variations.
Des ambiances sonores accompagnent ces phénomènes.
Je choisis d’arpenter ce nouvel espace en le considérant comme un nouveau site avec ses lois propres.
Recherche sur l’esprit lumineux
La première pièce qui ait déclenché tout un pan de travail particulier sur le questionnement de la lumière mnésique est la tentative de captage d’images avant l’endormissement (Cf partie Researches > Lights)
C’est la retranscription d’un enregistrement de la descriptions des images qui se forment et se déforment dans mon esprit avant de m’endormir.
Puis les pièces se sont enchaînées.
Je cherchais des protocoles, des systèmes d’existence adapté, des dispositifs probants.
Le dispositif langagier semblait être une solution.
Je tentais plusieurs choses, notamment de chuchoter directement à l’oreille des personnes en présence.
Le choix du mot Paradéïsos.
Cette performance invoquait le paradis, le jardin d’Eden, premier espace paysager clos organisé et non chaotique, avant la faute originelle.
Le processus langagier était engagé, emportant avec lui tous les signifiants/signifiés, symboliques et représentations mentales souhaitables, individuelles, culturelles.
La mémoire est sollicitée, entre en action : elle forme des espaces et des volumes lumineux que seul le récepteur de la performance engage lorsqu’il entend, comprend, analyse et concrétise le mot Paradéïsos.
Cette pièce fut suivie de Stimmung, pièce basée sur les mêmes principes, dégagés d’une symbolique religieuse.
Le Stimmung est pour Riegl, la vue lointaine et calme du monde, rédemptrice (Ruhe und Fernsicht).
Georg Simmel lui nous dit :
« On est autorisé à la désigner, elle [la Stimmung] et le devenir du paysage en question, c’est-à-dire la mise en forme unitaire de tous ses éléments particuliers, comme un seul et même acte, et cela comme si les diverses énergies de notre âme, perceptives et affectives dans sa tonalité, ne disaient unisono qu’un seul et même mot. »
Le protocole est de solliciter progressivement par une description chuchotée détaillée la formation d’un espace précis, dirigé.
La personne a les yeux fermés. Elle reçoit deux textes différents.
Le premier décrit le décor qui entoure la personne lors de la performance : le protocole de construction d’imago est entrepris avec des images connues et communes. En effet, nous avons fréquenté l’espace ensemble, juste avant. Je ne décris que ce que je vois et qui semble commun.
Puis un deuxième texte est chuchoté. Celui-ci évoque un paysage qui n’existe que parce que je le décris et qu’il prend forme dans l’esprit de la personne performée. Je choisis volontairement d’introduire du vocabulaire exotique, étranger au lieu.
Cette pièce révèle progressivement des espaces lumineux mobiles et fluctuant dans l’esprit des gens, basés sur la mémoire géographique et la persistance lumineuse de l’espace enregistré par le cerveau. Puis elle entame son travail de sollicitation de l’imaginaire et de l’anticipation.
Par ces pièces, il était question de dégager une mécanique, une organisation, issue de la construction des images intimes, des souvenirs et pensées paysagères. En considérant le postulat que ces phénomènes intimes de rappels ou d’anticipations, ces imago, sont des flux de lumière organisés en une succession d’activité, tantôt en agglomérats puis en dynamique de dispersions de type pixellaire, derrière nos yeux, composant et glissant vers une autre forme, inlassablement, je souhaitais travailler cette matière intime qui n’est ni vraiment physique, ni vraiment spirituelle mais bien un matériau dynamique informé.
Sorte de Declynamen lumineuse et sonore formalisant l’imaginal.
Il est question aussi du Cortex visuel primaire et supérieur
https://www.franceinter.fr/emissions/sur-les-epaules-de-darwin/sur-les-epaules-de-darwin-20-juin-2020 (rediffusion d’une émission de 2013, déclencheur de ma recherche.) et du passage vers le cortex sémantique cérébral.
Deux autres pièces existantes sont en cours de réalisation et études, sur les mêmes principes : solliciter l’image par le son, et constituer des collections.
Paysages fantômes / Nostos Algos

Depuis 2014 j’effectue des interviews et recueille des témoignages de personnes de diverses nationalités pour questionner le paysage de l’enfance, le paysage lointain temporellement. Le paysage calme et apaisant, comme Riegl évoque le Stimmung paysager
Ces paysages n’existent plus. Plus dans le même état. L’évolution et la conquête œuvrant physiquement dans l’environnement et les territoires.
Pour chacun ils n’ont plus le même état de matière. Ce sont des lieux fantômes n’existant que sous formes de souvenirs.
Puis j’ai orienté cette recherche vers autrechose que le Stimmung, afin d’envisager une relation différente à ces paysages errants.
Beaucoup ont quittés leur jardin, leur territoire, leur paysage.
Par obligation. Pour leur survie.
La catastrophe est polymorphe.
Lors de ravages, le milieu change d’un seul coup, est dé-figuré pour les victimes d’inondations, de tremblements de terre, de tsunami, bombardements.
Les espaces sont perdus. Leur histoire et leur symbolique aussi.
Mais il reste les mémoires de ces lieux en chacune des victimes.
Le lien à ces lieux existe encore.
Il est des paysages fantômes dont on ne peut faire le deuil. Des renoncements qui nous hantent.
Nostos Algos est une pièce d’art de la mémoire. Elle aussi.
Mon objectif ici est de recueillir la mémoire douloureuse, de faire émerger les paysages perdus par le changement climatique, l’exploitation directe capitaliste du paysage, ou les guerres de convoitises énergétiques.
Par exemple.
Mon geste est l’accueil de témoignages, mais surtout a conquête des images mentales de paradis perdus.
Quelle médiance mettre en face de nos paysages fantômes ?
Que faire de ces espaces mentaux paysagers qui nous hantent et nous blessent ?
Cosmophanies


La Cosmophanie est un néologisme que j’ai créé pour exprimer l’épiphanie de la rencontre esthétique avec notre cosmos. C’est-à-dire avec le cosmos que nous construisons, que nous enrichissons d’images d’ailleurs et de conceptualisations, ce cosmos qui compose une réalité d’imago que nous contenons et qui sert de base à l’échange de communs, par le biais de l’expression (verbe, formes, sons, etc…). Ce Stimmung lumineux interne. Le paysage de l’expression de la matière imaginale.
Par extension, Cosmophanie est une pièce qui révèle ce lien intense, vital, affectif, puissant, ce moment de réalité, de satori avec le paysage imaginal.
Cette pièce est le résultat de la poétisation des récits de mémoires paysagères, comme du témoignage de l’existence de paradis perdus.
Cosmophanie devient la conservation de paysages fantômes devenus lumineux (souvenirs).
Ici, dans sa conception, il est encore plus question de lumière et de phénomènes. Voir, de phénomènes lumineux.
Parallèlement à ses nonsites, Smithson intervient de plus en plus dans des sites, soumettant ceux-ci à des modifications ou des bouleversements afin de créer les conditions dialectiques d’un équilibre tout aussi précarisé. Qu’elles prennent pour objet l’asphalte déversé dans une carrière à Rome (Asphalt Rundown, 1969), les miroirs déplacés au Yucatan, au Mexique (Mirror Displacements, 1969), ou une baraque en bois partiellement enterrée dans l’Ohio (Partially Buried Woodshed, Kent State University, Ohio, 1970), les interventions de Smithson ne cessent de se dérober et de contourner les impératifs temporels et spatiaux qui définissent la production, l’exposition et la circonscription de l’objet d’art.
Encyclopédie Universalis France
Les nonsites (« non-sites ») de Smithson, réalisés à partir de 1968, répondent par exemple à la problématique du lieu de l’art soulevé par les artistes apparentés au land art. Constitués par des rochers trouvés lors de ses pèlerinages dans des paysages anthropiques et rassemblés à l’intérieur de bacs géométriques destinés à être exposés, les nonsites, « annexés » par des photographies, des cartes géographiques et autres installations hybrides, investissent un no man’s land – ce que l’artiste nomme son « truc va-et-vient » entre espaces d’atelier, plein air et lieux d’exposition. Ces travaux répondent dès lors à une tension dialectique qui met en jeu contenant et contenu de l’œuvre, deuxième et troisième dimensions, nature et culture et, inévitablement, temps et espace.
Mais alors que sont les Insites dont je parle?
Dans Une sédimentation de l’esprit : Earth projects, texte rédigé par Robert Smithson in Artforum en septembre 1968, une analogie est instaurée entre l’esprit et le paysage.
« L’esprit humain et la terre sont constamment en voie d’érosion ; des rivières mentales emportent des berges abstraites, les ondes du cerveau ébranlent des falaises de pensée, les idées se délitent en blocs d’ignorance et les cristallisations conceptuelles éclatent en dépôt de raison graveleuse. »
L’idée de « géologie abstraite » géologie mentale est avancée dans ce texte.
Cet espace dans l’esprit humain est pour moi le troisième pan que Smithson amorce ici : le In Site.
« L’homme dans sa double structure créatrice, est […] à la fois plastique et plasticien.[1] »
[1] REITHMANN, Max, Joseph Beuys : la mort me tient en éveil, Choix d’entretiens et essais, traduit de l’allemand par Edmond Marchal en collaboration avec Annie Reithmann, éditions ARPAP, Paris. ISBN : 2-905992-52-2 ; P. 18